Le mois de l’Europe de l’Est d’Eva, Patrice et Goran « La porte » Magda Szabo

« La porte » Magda Szabo –

J’ai absolument aimé ce livre et Emerence personnage principal m’obsède encore plusieurs mois après la lecture de ce livre magnifique. Deux femmes que tout sépare, une intellectuelle et une femme de ménage se côtoient pendant près de vingt ans, toutes deux fières de ce qu’elles font et de ce qu’elles sont. Au fil des ans, elles s’apprécient, se disputent, se critiquent au gré de leurs humeurs mais elles réalisent qu’elles s’aiment malgré tout, malgré elles, même si elles sont tour à tour ambivalentes.

On se dit malgré soi qu’il est normal pour l’écrivaine de ressentir cette fierté pour  son travail intellectuel et sa résistance face à l’oppression étatique. On est presque étonné que la femme de ménage soit elle aussi fière de ce qu’elle fait car le travailleur manuel est d’habitude plus humble. Et l’auteur en prend régulièrement plein la figure et consentira à la fin à prendre le balai, mais sans succès lorsqu’il s’est instauré un tour pour remplacer Emerence qui est à l’hôpital.

La stature admirable de la femme de ménage décrite comme une guerrière, son foulard, sa force, nous incite à la juger peu primaire. Nous découvrons à l’occasion de certains événement qu’elle dévoile au fil du roman, ses sacrifices, ses amours et sa tendresse pour l’auteur.

Les thèmes abordés sont nombreux et certains m’occupent encore l’esprit.

  • l’intellectuelle et la manuelle, l’esprit et le corps s’opposent. Emerence déteste tous les discours entendus, la religion ne valant pas mieux que le communisme.
  • l’amour fait souffrir, on peut même mener à sa perte l’objet de son amour.
  • faire le bien à quelqu’un malgré lui est une erreur qui entraîne aussi des souffrances.
  • la trahison et le mensonge sous prétexte de ménager ceux qu’on aime sont au cœur de cette histoire.

Il y a une tension dans ce livre qui nous submerge, un suspense quasi permanent, se dévoilent successivement quelques drames de la vie de la femme de ménage. L’auteur découvre peu à peu chez Emerence une humanité particulière, une sensibilité jusqu’alors invisible celle-ci ayant laissé planer volontairement des malentendus.

J’ai lu trois fois ce livre et j’ai essayé de repérer comment l’auteur maintient cette tension. Il y a des phrases longues mais fluides où l’on suit la pensée de l’auteur avec ses interrogations, ses émotions ; elle y insère les réponses d’Emerence et aussi un mouvement ou un regard du chien témoin essentiel de leur rivalité philosophique. Il y a abondance d’actions, d’humeur de chacun des personnages décrites avec beaucoup de finesse, les découvertes concernant Emerence, les informations s’emboîtant au fur et à mesure du déroulement du récit.

Il y a abondance de personnages, qui apparaissent au fil du temps, ceux du quartier où habite et travaille Emerence, les personnages de son passé, l’auteur et son mari, mais aussi leur chien témoin du secret et seul autorisé à franchir cette porte garante de l’intimité d’Emerence.

Je vous invite à lire ce livre magnifique.

5 réflexions sur “Le mois de l’Europe de l’Est d’Eva, Patrice et Goran « La porte » Magda Szabo

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